Michaël Sicsic reçoit le Prix de thèse 2021 de la Cour des comptes
Le 7 juillet, la Cour des comptes lui a remis le premier prix ex-aequo du Prix de thèse 2021. Michaël Sicsic, diplômé de l’ENSAI en 2007 et actuellement chargé d’études sur les inégalités et la pauvreté à l’Insee, a vu ses travaux récompensés parmi ceux de plus de soixante doctorants ayant soutenu leur thèse en 2019 et 2020. Entretien.
Michaël Sicsic a soutenu sa thèse « Les incitations fiscales au travail et à la recherche et développement en France et leurs effets sur le marché du travail » le 21 juin 2019 à l’Université Paris II.
“Depuis 2017, la Cour des comptes remet un Prix de thèse destiné à récompenser les travaux qui, quelle que soit leur filière académique, contribuent à la meilleure compréhension, au renouvellement de l’approche théorique et au développement de propositions innovantes dans le champ de la gestion et des finances publiques”. La Cour des comptes
Michaël, sur quoi porte votre thèse ?
Michaël Sicsic : La thèse porte sur la fiscalité, et plus précisément sur les incitations fiscales, au travail et à la R&D. Je mesure l’effet de l’ensemble du système socio-fiscal sur les incitations fiscales, puis l’impact de ces incitations sur les revenus et la R&D. J’évalue ainsi l’efficacité de certaines politiques publiques. Ma thèse est essentiellement faite de travaux empiriques mais comporte également des parties plus théoriques.
Pourquoi avoir participé au prix de thèse 2021 de la Cour des Comptes ?
M.S. : Après ma soutenance de thèse, le jury m’a proposé pour des prix de thèse, ce qui était déjà un honneur, donc je voulais jouer le jeu. Je savais que le sujet de ma thèse, la fiscalité et l’évaluation de politiques publiques, pouvait coller aux préoccupations de la Cour des comptes, donc je me suis dit : pourquoi pas !
Comment s’est déroulée la remise des prix ?
M.S. : Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes a fait un beau discours au début de la cérémonie, notamment sur l’importance de la recherche et des évaluations de politiques publiques, puis nous a détaillé le processus de sélection du jury. Nous, les lauréats, avons présenté notre thèse rapidement (sur le format, ma thèse en 180 secondes). Juste avant de recevoir le prix, Mme Sophie Moati, présidente de chambre honoraire et membre du jury a expliqué pourquoi nos thèses ont été primées, les a résumées et a évoqué leurs apports. Son résumé m’a fortement impressionné car c’est un exercice difficile et cela montrait qu’ils avaient lu ma thèse en détail. C’était une belle cérémonie, c’est émouvant de voir son travail acharné ainsi valorisé.
Vous êtes sorti de l’ENSAI en 2007, après avoir suivi le cursus statisticien public. Quel a été votre parcours par la suite ?
M.S. : J’ai occupé deux postes à la direction générale du Trésor (DG Trésor), où j’ai découvert les applications réelles de la macroéconomie et fait de la prévision économique. Puis j’ai été chargé d’études au département des études économiques de l’Insee, sur les entreprises et la R&D. Cela m’a permis de découvrir un autre monde, la microéconomie appliquée des entreprises, de nombreuses bases de données de l’Insee et du SSP et l’économétrie appliquée. Après la macroéconomie et la microéconomie des entreprises, je me suis tourné vers la microéconomie des ménages, en prenant le poste de responsable du modèle de microsimulation Ines à l’Insee. Je suis resté cinq ans sur ce poste passionnant où j’ai été en charge de nombreux projets plus enthousiasmants les uns que les autres.
Quel est votre poste actuel, et quelles sont vos missions principales ?
M.S. : Je suis actuellement chargé d’études sur les inégalités et la pauvreté à l’Insee. Une des missions principales de ce poste a été de coordonner un ouvrage sur les revenus et le patrimoine des ménages. Au-delà du travail de relecture et coordination, j’ai réalisé deux articles dans cet ouvrage : une vue d’ensemble des inégalités et de la pauvreté, et un dossier sur une nouvelle mesure et approche de la redistribution. Depuis la parution de cet ouvrage fin mai, je réalise des études sur les revenus, notamment une étude sur la mobilité intergénérationnelle en termes de revenus et une autre sur des comptes nationaux distribués par niveau de vie. Par ailleurs, je poursuis des travaux sur la fiscalité des revenus du capital en tant que chercheur associé à un laboratoire de recherche de l’Université Paris II.
Vous avez toujours mené une activité de recherche, en parallèle de vos postes au Ministère des Finances et à l’Insee : comment concilier les deux, a fortiori dans le cadre d’un doctorat ?
M.S. : Pour être franc, cela n’a pas été facile et j’ai beaucoup donné de mon temps personnel. A la DG Trésor, je n’ai pas vraiment fait de recherche, mais cela m’a permis d’y mettre un pied en lisant des études académiques pour mes études grand public. C’est vraiment au département des études économiques de l’Insee que j’ai commencé à en faire : c’est le département qui incite à faire de la recherche à l’Insee, tout en rédigeant également des synthèses grand public. Sur mon poste suivant, à la division « Études sociales », j’ai pu faire des travaux de recherche après une première année à prendre en main le modèle de microsimulation. Le fait d’être resté cinq ans m’a permis de mener de nombreux travaux et les approfondir. Cela a été notamment facilité par ma cheffe, qui était elle-même une chercheuse, via une journée (en fait plutôt une demi-journée) par semaine dédiée à la recherche. Ce temps m’a permis de faire l’essentiel de mes travaux de thèse, mais pour ce qui a été de les rendre au format académique, de l’introduction et la conclusion générale de la thèse, je l’ai fait essentiellement sur mon temps personnel.
Quelles sont les raisons qui vous ont mené à choisir l’ENSAI, et plus spécifiquement le cursus Statisticien Public ?
M.S. : J’aimais les maths, j’avais envie de découvrir l’économie, et je voulais travailler dans le secteur public : après une prépa scientifique, il n’y avait pas beaucoup de choix, l’ENSAI dans la filière fonctionnaire remplissait tous ces critères !
Que conseilleriez-vous aux futurs attachés statisticiens qui souhaitent se diriger vers la recherche ?
M.S. : Être curieux, patient, volontaire. Dans le cursus statisticien public, c’est moins facile de se diriger vers la recherche que dans le cursus ingénieur (mon petit frère Jonathan qui a fait le cursus ingénieur a soutenu sa thèse bien avant moi !), il faut en avoir conscience (en tout cas à mon époque mais le Master Evaluation et décision publiques a dû faciliter les choses). Mais ils ont deux très beaux exemples à l’ENSAI : Brigitte Gelein et Guillaume Chauvet, qui seront je pense de très bon conseil.
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