Ingénieure de l’ENSAI et doctorante en santé publique
Intégrer l’EHESS après un diplôme d’ingénieure en data science : c’est le choix qu’a fait Anaïs Fernandes, promotion 2021. Titulaire d’un Master 2 recherche en sociologie, elle se lance désormais dans une thèse au sein de l’école doctorale Erasme. Des statistiques à la santé publique, en passant par les sciences sociales : retour sur un parcours atypique.
“L’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) réunit des chercheurs et des étudiants du monde entier dans le but de faire coopérer toutes les disciplines des sciences sociales pour comprendre les sociétés dans leur complexité.” (1)
Objectif ENSAI
Anaïs Fernandes : “Dès la classe de seconde, j’ai su que je voulais faire des sciences sociales. Après le lycée, j’ai intégré une prépa B/L. C’est lors des portes ouvertes de cette prépa que j’ai entendu parler de l’ENSAI et de l’EHESS pour la première fois. Je me suis mise au défi d’intégrer ces deux écoles. L’EHESS propose des formations à partir du Master. Après mes deux ans en prépa, n’ayant pas eu l’ENSAI sur concours, je me suis intéressée à la filière MASS (Mathématiques Appliquées et Sciences Sociales). La responsable de la licence à Lille a accordé une attention particulière à mon projet d’intégrer l’ENSAI. Elle m’a proposé d’entrer en L2 pour faire de l’informatique et consolider mon dossier afin de mettre toutes les chances de mon côté. Cela a fonctionné, puisqu’au terme de deux ans de licence, j’ai intégré l’ENSAI via admission sur titres.
Des sciences sociales avec un diplôme d’ingénieure : pourquoi pas ?
Un diplôme d’ingénieure en statistique est peu commun dans le domaine des sciences sociales, mais d’après moi, il ne peut être qu’utile et valorisé. En troisième année à l’ENSAI, j’ai opté pour la spécialisation Data Science & Ingénierie des Données. Les compétences que l’on y acquiert peuvent être valorisées dans tous les domaines où sont traitées de grandes bases de données. Ce choix de ma part a pu surprendre, mais il a porté ses fruits quand j’ai décroché un stage de fin d’études à l’Ined. J’y ai travaillé sur la sociologie quantitative des couples de même sexe, sous la direction de Wilfried Rault.
Ce stage de troisième année a confirmé mon pressentiment : faire des sciences sociales avec un diplôme d’ingénieure, c’est atypique mais aussi très recherché puisque de nombreuses données sont traitées pour faire des études quantitatives.
Sous les encouragements de mon maître de stage, j’ai postulé à trois masters de l’EHESS et j’ai obtenu une réponse favorable pour deux d’entre eux. J’ai choisi d’intégrer le M2 de recherche de Sociologie pour me spécialiser dans le qualitatif et être polyvalente.
Du M2 recherche à la thèse
Le sujet de mon mémoire de Master 2 porte sur les violences sexuelles et sexistes. J’ai choisi de suivre principalement des séminaires de sociologie autour des violences. J’ai aussi dû sélectionner des cours d’une autre spécialité : mon choix s’est porté sur l’anthropologie. De plus, j’ai suivi un cours de tronc commun en “sociologie d’aujourd’hui”, le cours de ma directrice de thèse sur la quantification des sciences sociales et enfin un cours d’ouverture sur la pratique des logiciels d’analyse des données.
A l’EHESS, les séminaires se présentent sous des formes variées plutôt éloignées des cours magistraux. Ce sont des moments d’échange avec des professeurs qui présentent leur recherche, une bonne manière de mettre notre propre sujet de recherche en perspective. Dans le cadre de la rédaction de mon mémoire, j’ai eu la chance de réaliser un stage au sein du CESDIP (Centre de recherche sociologique sur le droit et les institutions pénales), une unité mixte de recherche du CNRS. J’ai pu travailler dans un domaine qui me correspondait réellement en alliant mes appétences et mes compétences techniques.
Au terme de mon Master 2, j’ai signé un contrat doctoral à l’école doctorale Erasme, au sein de l’Université Sorbonne Paris Nord. Mon directeur de thèse, Thomas Lefèvre, est chercheur à l’Iris, et mon co-directeur Gianluca Severi est chercheur à l’Inserm.
Ma thèse en santé publique est pluridisciplinaire. Je dois étudier le lien entre santé et violence à partir de données de cohortes, étudier la non réponse et développer des questionnaires à soumettre aux cohortes.
La force d’un parcours pluridisciplinaire
Dans le cadre de mon doctorat, je vais devoir analyser de grandes bases de données et créer moi-même des questionnaires. Mon diplôme d’ingénieure couplé à mon master de recherche me permet d’être polyvalente et de pouvoir à la fois traiter et analyser des données mais aussi proposer des solutions et des alternatives notamment face à la non réponse pour pousser la recherche sur le sujet.
Sur le long terme, j’aimerais poursuivre dans la recherche à travers un post-doc ou un poste d’ingénieure de recherche. Je souhaite me spécialiser dans la recherche sur les violences pour améliorer la connaissance et la lutte contre ces dernières.
Lors de mes études, mon projet a parfois suscité des incompréhensions de la part de mes encadrants. Malgré cela, j’ai suivi mon instinct et rencontré des interlocuteurs qui m’ont soutenue dans ma démarche. J’ai trouvé ma voie en empruntant les chemins qui me convenaient. Ce que je veux souligner, c’est que les Ensaiens et Ensaiennes qui veulent suivre ce type de parcours le peuvent tout à fait. Sur la page consacrée au Master de l’EHESS “Quantifier en sciences sociales”, il est spécifié que les étudiants de l’ENSAI peuvent candidater. D’autres masters sont aussi susceptibles de leur ouvrir leurs portes.
Certes, il faut beaucoup de motivation. Penser “recherche” demande des efforts après une formation d’ingénieur. Il faut trouver un sujet de mémoire, un directeur ou une directrice de mémoire, etc, mais c’est possible ! Je répondrai d’ailleurs avec plaisir aux questions d’Ensaiens et d’Ensaiennes sur le sujet.”
(1) : www.ehess.fr